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Chenilles processionnaires : le risque chez le chien et l'Homme s’étend sur le territoire

 

 

Désormais installées sur une grande partie du territoire français et notamment francilien, les chenilles processionnaires, du pin ou du chêne, sont des espèces qui impactent la santé humaine et animale. Tant leur aire de répartition géographique que leur saisonnalité se sont étendues.

Dans sa série « Vivre avec le changement climatique, les territoires s'engagent », le Réseau Île-de-France Santé Environnement a organisé un webinaire sur les chenilles processionnaires du pin et du chêne, des espèces dites « à enjeux pour la santé humaine », le 16 février.

Présente sur 1 % du territoire francilien au début des années 2000, la chenille processionnaire est désormais durablement installée sur 84 % de l’Île-de-France. Elle est fortement médiatisée au point que les processionnaires sont les seuls papillons nommés d’après leurs chenilles.

Parmi les causes qui expliquent cette extension géographique, Jérôme Rousselet, chargé de recherche à l’Inrae*, a cité le changement climatique (le réchauffement augmente le nombre de jours d’alimentation possible des chenilles) mais également l’implantation de plantes ornementales en milieux non-forestiers et notamment urbains.

La complexité avec ces espèces d’insectes est qu’elles ont aussi des intérêts et donc leur place dans l’écosystème. « Il faut donc être vigilant sur l’impact écologique des méthodes de gestion », a expliqué Jérôme Rousselet en précisant par exemple que les insecticides chimiques n’avaient aucun intérêt sur ces espèces.

Les risques sanitaires qu’elles induisent ont été exposés par Sandra Sinno-Tellier, médecin épidémiologiste et toxicologue, et la vétérinaire Catherine Collignon, de l’Anses**, respectivement pour les humains et les animaux domestiques.

 

Majoritairement bénin chez l’humain

Pour la population humaine, les données sont issues de celles enregistrées par les huit centres antipoison collectées dans une base nationale. Un travail sur les chenilles processionnaires a été réalisé dans le cadre d’une saisine de la Direction générale de la santé, avant donc le décret de 2022 qui a classé les chenilles processionnaires du pin et du chêne comme faisant partie des espèces dont la prolifération est nuisible à la santé humaine. Pour rappel, ce statut permet au préfet de prendre des mesures relatives à leur surveillance et à leur gestion par arrêté préfectoral dans les territoires où elles se développent.

Au total, les huit centres antipoison ont recensé 1022 cas entre 2012 et 2018, répartis dans 888 dossiers (en prenant en compte les expositions collectives) dont 594 dossiers concernant la processionnaire du pin et 157, la processionnaire du chêne (137 dossiers sans précision). Si les cas concernant la processionnaire du pin tendent à diminuer entre 2017 et 2018, ceux relatives à celle du chêne sont en augmentation continue.

Par ailleurs, de plus en plus de départements sont concernés et la remontée de ces espèces vers le nord est nette.

La saisonnalité diffère entre les deux espèces avec des expositions plus précoces pour la processionnaire du pin (pic en mars) que celle du chêne (pic en juin). Mais là encore, pour les deux espèces, la saisonnalité s’étend et on peut rencontrer des chenilles processionnaires en plein hiver. En médecine humaine, les plus exposés sont les enfants en raison d’un contact direct ou indirect (les poils des chenilles peuvent être aéroportés sur une dizaine de kilomètres). Les poils qui renferment la protéine toxique qui est libérée quand ils se cassent.

Dans 93 % des cas, l’exposition est cutanée et provoque rougeur, urticaire, papules… Des signes oculaires et respiratoires sont aussi rapportés.

La majorité des cas sont bénins, mais on enregistre quelques cas de gravité moyenne et, sur les 1022, 2 cas ont été sévères mais non mortels.

 

Risque surtout chez le chien

Chez l’animal, quelques publications rapportent une majorité de cas chez le chien par rapport aux autres espèces susceptibles d’être touchées (chats, chevaux, ruminants avec l'ingestion de fourrage contaminé par des poils urticants et les porcs avec le fouissement).

Le chat est moins fréquemment atteint que le chien, car il est souvent plus prudent dans son comportement exploratoire.

Chez le chien, les atteintes concernent principalement la cavité buccale avec un risque de nécrose de la langue dans 41 % des cas. Cette dernière n’est généralement pas mortelle et les chiens s’y adaptent.

Les atteintes cutanées sont beaucoup moins fréquentes que chez l’Homme.

Les vomissements sont rapportés dans la moitié des cas et les atteintes respiratoires ne sont pas rares. Les localisations oculaires sont plus anecdotiques.

« Les troubles apparaissent rapidement après une balade en forêt ou une exposition en ville », a signalé Catherine Collignon. Une prise en charge vétérinaire rapide est importante pour réduire le risque de nécrose de la langue.

L’intervenante a déconseillé les irrigations buccales qui entraînent un risque de rupture des poils urticants et donc d’aggravation des lésions par libération de la toxine.

Source : Le webinaire est disponible en replay : https://urlz.fr/kCQb.
*Inrae : Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement.
**Anses : Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail.